Ce Que Le Journal "L'Union" Nous Révèle Sur Les Accords Vignoble- Négoce

Publié le par AlexT

"L'étude était jusque-là confidentielle. La mission Erec a été confiée au cabinet Ykems par la filière champenoise et les deux coprésidents, Patrick Le Brun pour le vignoble et Ghislain de Montgolfier pour le négoce. Le but de cette étude est d'optimiser la situation de l'ensemble de la filière de façon purement économique.

La situation

La crise mondiale a entraîné une baisse des expéditions de champagne non anticipée en 2008 (-5 % en volume) et en 2009 (-23 % en volume sur les cinq premiers mois).
- Un déstockage important dans la chaîne de distribution aval, à hauteur d'au moins 30 millions de bouteilles, peut-être jusqu'à 60 millions de bouteilles d'ici à la fin de l'année

Le niveau des prix est en baisse sensible : apparition de premiers prix en grandes surfaces françaises en dessous de 10 €, parfois à 8,30 €.
- Du fait de la baisse des expéditions prévues, l'excédent de stock de la Champagne à la fin juillet serait de 255 millions de bouteilles, dans le scénario d'expéditions 2009-2011 le plus plausible. Pour certains opérateurs qui n'ont plus la possibilité de recourir à l'endettement, les déstockages sont indispensables pour sauvegarder leur trésorerie, affectée par la baisse des expéditions. Pour d'autres, ce n'est pas encore une obligation mais, dans l'intérêt de leur entreprise, ce sera une opportunité à ne pas laisser échapper.

Au pire, la Champagne finira l'année à 265 millions de bouteilles expédiées (on peut penser que ce sera un peu plus).
On espère 290 millions de bouteilles en 2010. Puis, la reprise aidant, une hausse de 5 % les années qui suivront.

Conditions pour sortir de la crise

Les quantités disponibles à la vendange ne doivent pas dépasser le niveau permettant au stock global de la filière de revenir en deux ans au niveau d'équilibre de 3,2 années de stock ; ceci correspond à 500 à 8 000kg/ha maximum. Le niveau de décaissement annuel des maisons de champagne pour leurs achats de matière première ne doit pas dépasser un plafond critique, estimé à environ 7 500 à 8 000 kg/ha.
- le niveau d'encaissement annuel des vignerons en rémunération de leurs apports de raisins à la vendange ne doit jamais descendre en dessous d'un minimum vital, estimé à 9 500 à 10 500 kg/ha.
- Un signal fort capable de faire évoluer les anticipations doit être donné aux acheteurs de champagne, ainsi qu'à tous les opérateurs et à leurs commerciaux. 

Pour l'interprofession, il est impossible d'interdire le déstockage et de contrôler les prix de vente. La seule manière de rompre la spirale déflationniste est de prendre des décisions qui améliorent les problèmes de trésorerie des vendeurs. Une baisse du rendement aurait un effet positif sur la trésorerie des vendeurs, et donnerait un signal de rareté de l'offre sur le marche. Les déstockages anticipés cesseraient et les potentiels déstockeurs conserveraient leurs volumes en attendant la remontée des prix. Selon l'étude, plus le rendement sera faible, meilleur sera l'impact sur les prix des expéditions.

Le compromis

Les contraintes des « 10 000 kg/ha minimum » du vignoble et des « 8 000 kg/ha maximum » du négoce semblent inconciliables. Seule une solution de compromis semble envisageable, qui consisterait à choisir un rendement 2009 entre : le plancher de 10 000 kg/ha du vignoble et le plafond de 8 000 kg/ha du négoce. Une telle approche mènerait donc naturellement vers un accord de rendement 2009 tirable de l'ordre de 9 000 kg/ha. Mais pour la mission Erec, ce compromis, trop bas pour les vignerons, trop élevé pour les négociants, n'est pas bon.

La Champagne a été la première de toutes les régions viticoles à innover avec la réserve qualitative. Toujours selon l'étude, « la Champagne peut aller plus loin encore et innover à nouveau » en dissociant les quantités disponibles et les quantités payées aux producteurs. Une première ! Les quantités récoltées entre 8 000 kg/ha et 10 000 kg/ha font l'objet d'achat ferme par les maisons qui les conservent en cuves sans tirage en bouteilles, à condition d'être vendues dans le cadre de contrats pluriannuels (raisins et moûts + vins clairs et bouteilles issus de surfaces déterminées) ou de contrats ponctuels (raisins ou moûts) ; le prix de vente du kilo de raisin de ces quantités est celui applicable à la vendange 2009 (augmenté de quelque pourcentage).
Le déblocage de ces quantités aura lieu au plus tard deux années plus tard, permettant un tirage au printemps 2012.

Le paiement

La valeur des 8 000 kg/ha serait réglée par les maisons à leurs livreurs de raisin en quatre échéances annuelles. La valeur des 2 000 kg/ha du « blocage spécial » sera réglée par les maisons à leurs livreurs de raisin par un billet à ordre tiré sur la ou les banques de leur choix, à échéance moyenne de deux années, soit au 20 avril 2012.
Ceux des vignerons qui le souhaiteront pourront demander à la ou les banques de leur choix d'escompter leurs billets à ordre, moyennant paiement des frais financiers afférents.
Ceux-ci seront couverts en partie par le surprix du raisin facturé aux maisons pour ces quantités. Compliqué ! Sûrement, mais il est difficile de dire si le vignoble souhaite et veut entendre un discours aussi technique et qu'économique".

sic "Le quotidien L'Union" de Reims
 

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